Descente sur le Guer

Et au milieu de la forêt, coulait une rivière…

Cette rivière se nomme Le Guer. Une petite rivière qui jusqu’à présent s’était faite tellement discrète que personne n’imaginait qu’elle se descendait jusqu’au jour où…

Jusqu’au jour où je traverse en VTT la forêt de Coat an noz et de Coat an nay sur les communes de Belle isle en terre, de Plougonver et de Gurunhuel dans les Côtes d’Armor.
En été je longe une partie de cette rivière et en tant que bon kayakiste je m’imagine tout de suite ce que cela peut donner avec de l’eau en hiver.

L’automne venant avec ses nombreuses pluies, ma curiosité s’intensifie, me voilà en train de décortiquer la carte IGN pour savoir où embarquer et où débarquer, je calcule le{8f30fada19ea3a205dc6d93e0eb88b171046dfb7108d4b8438b666b4dfb828eb} et là, la surprise est de taille surtout en Bretagne: 0,9{8f30fada19ea3a205dc6d93e0eb88b171046dfb7108d4b8438b666b4dfb828eb} de pente sur une portion de 7 kms puis 1,5km avec moins de pente jusqu’à Belle isle en Terre.
Le petit repérage à pied étant fait au début et à la fin de la portion car au milieu il aurait fallu 2 journées de marche en pleine forêt, le constat est positif: c’est navigable et les arbres ont l’air dégagés. Il ne me reste plus qu’à trouver une petite équipe commando pour descendre cette rivière inconnue en tout cas pour ma génération!
La date est choisie et le commando aussi:François Potin, Gildas Miossec, Claude Le Moal et moi même.

Nous voilà partis en sachant que le niveau d’eau à Lannion est très correct, çà doit le faire!
Nous décidons de descendre jusqu’à Belle en terre (embarquement du haut Léguer et la jonction avec Le Guic) en sachant que le dernier 1 km 500 est moins intéressant mais le parking pour les véhicules est plus pratique car il existe très peu d’endroits pour se garer sur la D22 quand on remonte le bas du Guer.
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Nous remontons à l’embarquement choisi, c’est à dire sur la D54 entre Gurunhuel et Plougonver au lieu dit du Moulin de Trobodec.
Attention, il n’y a pas de panneaux mais vous ne pouvez pas louper la rivière, c’est le seul pont sur cette route.

Nous voilà partis pour environ 9 kms de descente et nous avons tous ce sentiment que tout kayakiste ressent quand il descend pour la première fois une rivière qui ne connait pas. On sait que l’on ne s’engage pas dans du classe 5 mais que va t’on découvrir?

Le premier kilomètre part dans les prairies et les zones humides. Dès le départ il faut passer sous des poutres posées sur des piliers d’un ancien pont, les berges sont dégagées et la rivière descend tranquillement. Des petites veines d’eau se succèdent, un endroit où la rivière se sépare en deux, je prends à gauche, François à droite et c’est à droite qu’il fallait prendre!
lg2 Au deuxième kilomètre, nous entamons la partie qui part dans la forêt, là c’est l’inconnu. Nous nous engageons dans une partie plus sombre malgré la percée de quelques rayons de soleil à travers la végétation de plus en plus dense dans la forêt de Coat an nay.
La rivière est bien dégagée mais les coups de vents automnaux ont eu raison de certains arbres en bordure de rivière. Pour la plupart on passe dessus sans problème…
lg3 …et pour d’autres nous devons utiliser tout notre savoir faire!
C’est une classique mais avec des jeunes ou des kayakistes qui débutent, il faut débarquer!
Par la suite, plus nous progressons et plus le parcours devient ludique avec des beaux petits passages dans un paysage dédié aux Trolls et aux Elfes dixit Fanch.

lg4Claude en pleine action!
La rivière ne s’arrête jamais, ceux sont des petits courants qui s’enchainent au fur et à mesure de la descente.

lg10 lg6 Fanch entame le troisième kilomètre après une passerelle en bois. A cet endroit nous sommes au cœur de la forêt. On aurait pas craché sur un 15cms d’eau en plus, c’était je pense le niveau idéal pour cette descente où par endroit, çà grattait un peu mais pour découvrir ce n’était pas plus mal car les contres ne sont pas nombreux et la rivière ne s’arrête jamais et on tombe sur des petites surprises tel qu’un pont trop bas comme sur cette photo:
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Avec 15 cms d’eau, le débarquement devient obligatoire sur une partie en amont où les contres se font très rares, il faut être très observateur et vif pour s’adapter le plus vite possible.

La rivière continue sa descente sur le même rythme, c’est toujours aussi plaisant et agréable à naviguer puis au quatrième kilomètre la rivière ralentit et un bruit d’eau plus soutenu se fait entendre: en Bretagne on pense tout de suite à un barrage.
En effet nous arrivons à la pisciculture, le seuil se franchit juste à droite de la passe à poisson, ailleurs çà ne passe pas et surtout il ne faut pas s’engager dans le canal de dérivation qui part à la pisciculture.
Le seul problème, c’est une grosse branche après le seuil qui bloque le passage, Fanch réussit à passer dessus mais la fait pivoter. Je m’engage dans le seuil mais je ne réussis pas à passer dessus et je me fais un coincement entre la branche et le seuil. Il faut réagir tout de suite surtout que le petit rappel commence à m’attirer mais je sais que mes collègues vont vite réagir.
Je me mets en appui sur la branche et Fanch à déjà débarquer sur la passe à poisson pour me tendre la pagaie et m’aider à passer par dessus la branche.
C’est l’avantage de descendre avec des fins techniciens et des collègues formés à la sécurité!
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Par mesure de précaution nous avons ensuite enlevé la branche avec des cordes car nous avions évidemment apporter avec nous tout le matériel de sécurité nécessaire pour une descente de rivière: le kayak adapté(plutôt court), une tenue chaude, le gilet de sécurité, une corde, un couteau, des bouts, mousquetons et une trousse de secours.
Il ne faut jamais oublier ce type de matériel même si on descend une rivière de classe 2 et surtout si on ne la connait pas car on peut avoir des surprises comme ce bel arbre en travers…
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…où nous avons évidemment débarqué après un arrêt dans un tout petit contre en amont. Ce tronc se trouve après avoir longer la pisciculture qui est une partie très encombrée où Gildas a eu un petit stress sur une autre branche.

Nous continuons à descendre au fil de l’eau pendant 500 mètres après le seuil et la végétation commence à s’éclaircir.
Nous arrivons au moulin de Ponchou Léguer où nous restons jouer dans une petite veine d’eau juste en dessus de ce magnifique bâtiment restauré où les propriétaires qui après quelques secondes d’étonnement de voir apparaître des kayakistes dans leur havre de paix nous saluent chaleureusement et nous restons encore plus motivés pour poursuivre notre route.
Je n’est pas pris de photos car je voulais respecter leur propriété qui aspire surtout à la tranquillité et ne veut surtout pas être dévoilée aux passants.
C’est à vous de découvrir tout ceci en descendant cette rivière.

Ensuite au sixième kilomètre après avoir longé la D22nous arrivons au moulin du Loc’h Du où il faut prendre le bras de gauche. Nous arrivons au vieux pont en pierre où la fin de la partie intéressante prend fin.

lg12Claude qui contemple ce paysage et au dessus Fanch en pleine action.

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Nous avions décidé de continuer jusqu’à Belle isle en Terre car à ce moment de la descente il reste un peu moins de 2 kms. Nous suivons la route à droite puis nous arrivons dans une ferme avec un pont très bas, notre très grande souplesse nous permet de passer mais avec un peu plus d’eau il faut débarquer dans la prairie rive gauche et embarquer 200 m plus bas (c’est un portage facile et rapide). Après un barrage un peu effondré nous arrivons au pont de la station de pompage de Belle isle en terre où nous trouvons une échelle, elle marque 0,6m: c’est donc le niveau minimum pour faire cette portion et à mon avis 0,9 est le maximum, au delà çà devient dangereux avec les branches.
La civilisation se fait sentir, nous passons sous le pont de la D712 où vient d’être aménagé un balcon pour permettre à la loutre de migrer vers l’amont de la rivière, puis nous passons devant le château de Lady Mond qui accueille maintenant le centre d’initiation à la rivière (très compétent si vous voulez former vos jeunes et moins jeunes à l’environnement).
Nous traversons Belle isle en terre qui se trouve coincée entre le Guic et le Guer, vous aurez donc deviné d’où vient son nom et nous débarquons au collège et terrain de foot en rive droite au niveau de la passerelle du Chopi.
C’est là l’embarquement du Haut Léguer mais c’est une autre histoire…

Nous avons été agréablement surpris par cette petite rivière qui descend dans un milieu sauvage. Il faut également souligner que la classification en Natura 2000 (bassin versant du Léguer et zone de la loutre) permet par le biais de “la vallée du Léguer” et également des pêcheurs d’entretenir ce type de rivière qui n’était pas auparavant navigable.
Je remercie ces acteurs et à nous kayakistes de participer aussi à la préservation de ces sites en respectant les propriétés, la faune et la flore.
La curiosité, la nouveauté et l’adaptation sont toujours  récompensées chez un kayakiste!

Michel Lanchec

Descriptif :     Topo Guide « Le Guer »     Rivière des Côtes d’Armor

1-    Distance de navigation: un peu moins de 9 kms en classe 2.
2-    Situation géographique: Ouest du département (proche des limites du Finistère). Embarquement : au sud-est de Belle Isle en Terre, sous le pont de la D54 entre Gurunhuel et Plongonver. Débarquement : se fait à Belle Isle en Terre en rive droite juste avant le terrain de foot.
3-    Présentation: une rivière en pleine nature et traversant pour ces 3/4 la forêt.
4-    Physionomie: c’est de la classe 2 soutenu pendant les 7 premiers kms puis du 1(2) jusqu’à Belle Isle en Terre. Le Guer est un affluent du Léguer.
5-    Paysage: des prairies, de la forêt et quelques moulins. Vous êtes dans le bocage breton vallonné, la navette par Gurunhuel vous donne un bon descriptif du paysage local.
6-    Pente: 0,9{8f30fada19ea3a205dc6d93e0eb88b171046dfb7108d4b8438b666b4dfb828eb} dans les 7 premiers kms (pas mal pour la Bretagne).
7-    Isolement: une fois partis dans la forêt, la première route sera au moins à 3 kms et en plus vous n’êtes pas sûrs de rencontrer quelqu’un
8-    Logistique: laisser le véhicule au terrain de foot de Belle Isle (c’est le plus pratique)et la navette se fait par Gurunhuel ou si vous avez un chauffeur il peut vous attendre à la fin des 7 kms (vieux pont en pierre sur la D22).
9-    Durée: il faut compter 2 heures 15 pour les 9 kms.
10-    Au fil de l’eau: des prairies, de la forêt, encore de la forêt et des prairies.
11-    Risques particuliers: attention aux arbres et aux ponts trop bas
12-    Le niveau d’eau: minimum 0,6 et maximum 0,9 à l’échelle de la station de pompage de Belle Isle
13-    Alternatives: s’il y a trop ou pas assez d’eau, vous avez 40 kms de rivière qui suit avec le Léguer.
14-    La première descente: le 27 novembre 2009
15-    Les contacts pour des renseignements sur la rivière: la base nautique municipale de Lannion (Mich ou Gildas) au 02 96 37 43 90, Claude Le Moal au club de la Roche Derrien au 02 96 91 51 48